Ce week end nous sommes partis à la découverte d’un château abandonné dans la vallée de Chevreuse. Armés de la N.O. mobile, nous avons branché le GPS sur la ville de Bonnelles (Yvelines). Une fois arrivé, nous avons pris un petit chemin et franchi quelques vieilles barrières et autres barbelés.
A première vue, la bâtisse est impressionnante. Au moins 3 étages (si ce n’est 4 !) d’un château en brique et meulière. Régulièrement, des incrustations de pierre sculptées ponctuent l’enchainement de la façade. Au rez de chaussé, les fenêtres sont toutes murées et complétées de morceaux de verre pour éviter leurs franchissement. En faisant le tour, nous constatons qu’un deuxième bâtiment est placé dans l’alignement du premier. Entre les deux subsiste un terrain accidenté, qui témoigne de l’effondrement (ou de la démolition) d’une liaison entre les deux édifices. Les traces de toitures et d’aménagement intérieurs sont encore visibles sur l’un des murs.
Après avoir fait le tour, nous entrons par une des fenêtres. Une fois dedans, nous tombons sur une grande salle de réception. Les plafonds sont encore décorés de stuc d’époque (perchés à plus de 4 mètres). Le volume est plutôt dégagé, avec pas mal de décors. Une grande partie du plafond est tombé sur un des cotés, laissant apparaitre les poutres, les lambourdes et le bacula (lattis de châtaigner). D’un simple coup d’œil il est facile de repérer qu’il y a de grosses infiltrations d’eau ici ! Le sol est de toute beauté. C’est un dallage de marbre carré, avec des alternances gris/rouge. Même sous la poussière, nous devinons la qualité des matériaux !
Dans les pièces à cotés, de gigantesque tas de gravats bouchent totalement le passage. Un trou dans le plancher au dessus montre que ce sont plusieurs étages qui sont descendus. En continuant, nous arrivons dans le hall de l’escalier d’honneur. Malgré la destruction, nous pouvons encore voir des morceaux d’un imposant escalier à marche massive de marbre qui montait en s’enroulant le long du mur. Au premier étage, une série d’ouvertures (je devine encore les gardes au corps) donne sur le vide du volume. Au dessus, une circulation en porte à faux ceinture les murs. Le dessous de cette circulation est orné de stuc finement réalisés. Enfin, une verrière zénithale éclaire l’ensemble.
Malheureusement, l’escalier a été pillé. Il ne reste plus que quelques marches en marbre et des éléments du garde corps en fer forgé (et tordu). Le pavage manque ici, il a été retiré. Des tas de gravats trainent un peu partout, avec des morceaux de radiateurs en fonte. Il y a même des traces d’incendie (très localisé) et de peintures.
Nous escaladons les restes de l’escalier et accédons enfin au premier étage. Les volumes ont été divisés en de nombreuses chambres et je trouve beaucoup de sanitaires. Ce lieu devait être une collectivité (centre de vacances ?). Par endroit, les planchers sont très endommagés. Les poutres sont en porte à faux dans le vide, et les restes de planchers semblent attendre de tomber. Dans d’autres endroits, le parquet gondole joyeusement sous la moquette. Plus nous montons dans les étages, plus les conditions se dégradent. En arrivant à la petite circulation au dessus de l’escalier d’honneur, nous trouvons même des étais portant le plafond de la circulation. C’est amusant de se dire que cet étai reporte le poids du plafond sur le porte à faux au dessus du vide….
Nous arrivons dans une des zones les plus sinistrés. Deux niveaux sont intégralement tombés, donnant une impression de tremblements de terre (les moquettes pendent dans le vide, les tuyaux de radiateur sont arrachés avec en contrebas des morceaux de fontes). Une des poutres de la charpente a même ripé d’un petit mètre vers le bas. Le bois prend l’eau, il pourri joyeusement. Le jour où cette poutre cède, plusieurs dizaines de mètre carré de toitures vont dégringoler !
Nous trouvons aussi des pièces (toutes au format internat) en meilleur état. Les radiateurs sont encore la et les fenêtres sont encore fermées. Au dernier étage, les velux manquent. L’eau qui rentre nourri des mousses vertes qui poussent sur la moquette (ultra propre pour l’occasion).
Nous achevons de monter dans ce château en escaladant l’escalier pourri qui accède au toit (en fait, il ne reste plus rien de l’escalier). La haut, la vue est belle. Le premier plan du plomb et du garde corps en fer forgé tranche avec la verdure de la percée dans la forêt. Deux belles girouettes sont encore présentes, mais n’indique plus les vents depuis bien longtemps.
Il y a de nombreux bourdonnements autour de nous. Pas moins de 5 ruches sont installées dans les souches de cheminées (et même une dans une des chambres). J’ai l’impression d’être sur le toit de l’opéra Garnier !
Après moult photographies, nous décidons de descendre et terminons notre visite par la cave. De nombreux volumes ont été transformés (cuve, chauffage, buanderie, sanitaire, lieu de vie). Sous l’escalier d’honneur, deux oculi dans le plafond communiquent avec le rez de chaussé. Ils sont équipés de lentilles qui permettaient à la lumière du jour de pénétrer dans la cave. Tout ca et malheureusement recouvert de gravas aujourd’hui.
Notre visite finie, nous regagnons le parc et partons visiter une ferme abandonnée dans les environs.
Histoire de ce château :
Le château de Bonnelles fut construit en 1847/1849 pour le duc Giraud d’Uzès par les architectes Froelicher et Clément Parent. De 1906 à 1933, il appartenu à la duchesse d’Uzès, héritière des champagnes Veuve Clicquot. C’est à cette époque qu’il fut très connu avec un équipage de chasse à courre des plus réputé. Après la seconde guerre mondiale, il a été transformé en école privé (Collège international de Bonnelles). Revendu au début 1990 à des Japonais (pour 50 millions de Francs français), il devait être transformé en golf 18 trous. Malheureusement, le château fut pillé par ses acheteurs et laissé à l’abandon. Récemment, un particulier l’a racheté environ 400 000 euros. Depuis, son état se dégrade régulièrement sans aucune mesure préventive.
Mise à jour oct. 2014
Un an après notre visite, un incendie détruisait une bonne partie des combles. Peu après, un des représentants des propriétaires me contactait pour demander le retrait de cet article (préjudice à l’image). Dans la foulée, des travaux importants ont eu lieu en 2010, puis 2011. Depuis, l’ensemble a été abandonné à son triste sort. Quel dommage :(